Après la pluie, le beau temps.

Samuel était allongé sur son lit. Il tenait dans ses mains le journal quotidien qu’il avait récupéré lors d’une excursion au village. Il lisait avec intérêt l’actualité départementale. Il n’y avait pas grand chose d'intéressant. Ils étaient en train de parler de politique. Samuel n’avait jamais vraiment été intéressé dans ce domaine. Il n’avait d’ailleurs jamais voté. Il trouvait le fait de pouvoir le faire vraiment génial car cela exprimait clairement la liberté que chaque personne avait. Il sourit à cette pensée et entendit dehors quelques bruits. Ce devait être Mary qui avait du finir sa transformation. Sa curiosité grandissante le poussait à se lever et à l’harceler de question mais il réussit à la contenir, attendant un peu s’étalant sur son lit en fixant le ciel. Il adorait l’idée qu’une vitre leur servait de toit. Il avait l’impression que si il tendait la main il pourrait toucher le ciel. Il se dit en cet instant à quel point ce devait être agréable d’être un oiseau, de voler dans les airs, de traverser les nuages. Il aurait aimé pouvoir être un aigle comme la jolie rouquine. Il voulait se sentir léger, être transporté au gré des vents.

Après quelques minutes de réflexions, il se décida à se lever. Il passa une main dans ses cheveux bruns, machinalement. Il ne faisait pas ça pour plaire à la jeune femme, non. Si les choses devaient se passer, il devrait l’intéresser pour ce qu’il est vraiment; un rêveur mélancolique, observateur, avec une psychologie profonde et qui ne peut s’empêcher d’être fasciné et d’analyser le comportement humain. Il ne comprenait même pas pourquoi il pensait à ça. Il ne pouvait pas nier le fait qu’il la trouvait vraiment magnifique et déstabilisante et penser à ce qu’une attirance mutuelle puisse avoir lieu était pas vraiment son genre de pensées. Non, Samuel vivait dans le présent..un peu trop quelques fois.

Il se dirigea vers le salon commun la voyant allongé à contempler le ciel. Ça lui faisait plaisir de voir qu’il n’était pas le seul à occuper son temps en admirant le paysage. Il resta debout sans la déranger, se servant un café car il y avait en effet une cafetière dans leur chalet. Elle sursauta lorsque le bruit de la machine à café ronronna et Samuel se tourna vers elle avant de commencer la conversation.

- Ça doit être agréable de voler..non? On doit se sentir si léger, si libre de toutes contraintes...

Samuel vit que Mary lui fit de la place de façon à ce qu'il vienne s'asseoir à ses côtés. Il ne refusa évidemment pas. Il se positionna donc sur le sofa avant de fixer la jolie jeune femme en buvant son café. Elle lui contait son incapacité à se rappeler de ses transformations. Samuel pouvait bien comprendre cet état, lui aussi ne savait pas ce que faisait son esprit animal. La différence c'est que le brun ne se transformer tous les 106 ans ce qui n'était pas le cas de son acolyte. En plus dans cette région, la pluie en était une fidèle amie.

- Je comprends ce que c'est. C'est pareil pour moi, c'est aussi très douloureux mais par chance je ne me transforme pas souvent.

Il ne se souvint pas lui avoir d'ailleurs dis quel animal il était. Elle pourrait penser qu'il voudrait garder cette chose secrète pourtant tout cela lui était vraiment égal. Samuel était comme un livre ouvert, tout le monde savait tout sur lui. C'est pour ça qu'ils avaient d'ailleurs tendance à ne pas l'approcher. Il faut dire que malgré les bonnes intentions du jeune homme il pouvait blesser de nombreuses personnes. Ses phrases avaient le don d'être ferme et sévère et les autres pensait qu'il avait tendance à les juger. Il ne le faisait pas, il les analysait simplement et voulait leur faire clairement comprendre ce qu'ils n'arrivaient pas à s'avouer.

Samuel sourit à la question de Mary. Il était comme plutôt heureux que la jeune femme s'intéresse un peu à ses transformations. Il commença alors à lui expliquer tout ça, commençant par le plus important.

- Je suis un lion. Je dois bien dire que c'est assez stressant d'incarner cet animal car il est impossible d'être vu en public sinon je risquerai d'être capturé et emmené dans un zoo. Ensuite, va leur expliquer que tu es un humain métamorphe. Je risquerai d'être aussi enfermé dans un zoo ou livré à la science. Quand à ma luxna c'est lorsque la température et au-dessus de 27 degrés mais j'ai cette montre pour m'aider à fuir dans un endroit frais lorsqu'elle est trop haute.

Il continua à boire doucement son café. Étirant un peu son cou. Repenser à ça faisait naître au bas de son cou une douleur presque insignifiante. En effet, c'était par là que commençaient ses douloureuses transformations. Il ne les aimaient d'ailleurs pas. C'était vraiment atroce à vivre et l'idée qu'il était en train de changer pour devenir un autre le répugnait.

Il sourit gentiment. Il aimait bien la présence de Mary, il pensait l'avoir plutôt cerné. Elle avait un comportement logique et compréhensible et avec elle il n'était pas confus, tout mélangé par ses réactions. C'était agréable des fois d'apprécier une personne sans avoir à l'analyser 24/24.

- Je pense que la pluie peut se contrôler, il suffit de m'empêcher de chanter comme une casserole. Il rigola légèrement avant d'ajouter. Non sérieusement, je pense que tout pourra être contrôlé un jour, ce qui est quelque peu inquiétant d'ailleurs.

Samuel avait toujours trouvé que les avancés technologiques et manuelles étaient bien trop rapide. Il était dans cette idéologie du "c'était mieux avant". Il n'avait rien contre les petites choses qui lui étaient vraiment utiles au quotidien comme le téléphone portable ou l'invention des CDs. Mais il avait l'impression que dans à peine dix ans, les hommes finiraient par tous être des robots télécommandés par le gouvernement et l'état. Il ne pensait pas spécialement que le peuple était les marionnettes des politiques mais il ne doutaient pas que dans le futur il le serait. Il n'avait pas tendance à avoir vraiment peur de quoi que ce soit mais il devait avouer qu'il craignait l'avenir quelques fois.

Le  brun lui sourit gentiment. Elle n'y avait peut-être même pas pensé mais sa phrase était vraiment pleine de bonté. Il baissa les yeux un instant puis la fixa à nouveau. Il n'aimait pas regarder les autres trop le temps, certains pouvaient mal le prendre, et détourner le regard prouvait que la situation avait rien d'une bagarre psychique.

- C'est vraiment honorable.

Il le pensait vraiment. Il était franc et ne se serait pas prononcé si tout cela n'en valait pas vraiment la peine.

- Tu souffres beaucoup à chaque transformation, je le sais parce que je le vis. Et te sacrifier en quelque sorte pour les autres c'est vraiment gentil. Tout le monde ne le feraient pas, moi le premier.

C'est sûre qu'étant plutôt antipathique il n'avait pas grand chose à faire de si les autres souffraient. Il était pas spécialement égoïste pour autant, juste logique. Comme il ne ressentait pas de peine pour les autres, autant que lui ne ressente aucun mal. Au final si les humains s'inquiétaient de la santé des autres c'est parce qu'ils ressentaient la peine de l'autre. Donc au final, chaque geste était intéressé et tout le monde était un peu égoïste.

Samuel ne put s’empêcher d’afficher un large sourire. Elle était intelligente et cultivé, il l’avait bien compris par ses paroles. C’était bien appréciable de tenir la conversation avec ce genre de personnes qu’avec d’autres qui ne pourraient par exemple même pas citer les présidents de la Vème république ou alors un autre qui était incapable de tenir sa langue affilée.

Il sourit, il avait beau trouver la religion absurde et ridicule, elle était tellement passionné et croyante qu’elle aurait presque pu le convertir. Enfin, si il savait pas que tout cela était une invention pour justifier des guerres et escroquer les pauvres personne qui avait besoin de se raccrocher en quelques chose en quoi croire. Il ne lui dit pas. C’est d’ailleurs une des première fois où il ne faisait pas part de ses pensées à quelqu’un. Il avait l’impression qu’il aurait pu la blesser et qu’elle aurait pu comprendre qu’il ne respectait pas ses croyances. Ce n’est pas comme ça qu’il voulait qu’on le voit. Si ça n’aurait pas été Mary il lui aurait sans doutes fait un interrogatoire pour savoir à quel point elle avait souffert dans sa vie pour se raccrocher autant à cette escroquerie mais c’était bien Mary alors il se tut. C’est bien une des premières fois où il prenait en considération les sentiments des autres. Il la trouvait douce et gentille et avait certes envie d’en apprendre plus pour elle mais cette fois il voulait le faire convenablement. Il posa alors une question bien simple.

- Comment tu connais Lanza del Vasto?

Ça pouvait paraître idiot mais il voulait vraiment savoir d’où elle avait lu des récits de cet homme, pacifiste, prêchant la non-violence.

Samuel pouvait clairement voir dans les yeux de la demoiselle une admiration imprononçable pour son père. Elle aurait clairement voulu être comme lui. Il était sage et cultivé et elle s’était sans doutes mise à lire pour l'impressionner. Ce devait être dur pour elle, il devait être un de ces hommes silencieux et elle avait sans doutes du souffrir de l’absence d’un père dans sa vie. Elle avait eu le philosophe, celui qui avait toujours de sages paroles pour lui faire croire en la vie. Mais était-il réellement là quand il avait besoin d’elle? Samuel en doutait réellement. Après tout, elle était ici, seule et perdue à son âge. Il était certains que l’homme qu’elle admirait autant n’était pas forcément celui qu’elle croyait. Il l’avait sans doute rejeté et envoyé ici à cause de ses métamorphoses. Elle n’était pas le genre de personnes à vraiment prendre des décisions pour elle-même, toujours cocouné par ses parents.

Il se sentit peiné pour elle, c’était vraiment exceptionnel. Il n’était pas du genre à se sentir mal pour les autres. Mais il y avait quelques personnes à qui il tenait et Mary semblait être l’une d’entre elles. Il souffla doucement, le problème c’est que Samuel était un destructeur. Même si ils tenaient aux autres, il ne pouvait pas s’empêcher de les pousser à bouts pour découvrir la vérité ou pour qu’eux la réalise. C’était triste pour lui car il s’interdisait un peu de s’attacher aux gens pour ça, heureusement pour lui il était assez antipathique alors ce n’était pas vraiment difficile. Mais il y avait des fois quelques failles et le fait qu’il ressentait de la peine pour la jolie rousse lui fit peur car c’était une de ses failles, un des seules possibilités de l’atteindre et de le faire souffrir.

- “Ce n'est pas assez d'avoir l'esprit bon, mais le principal est de l'appliquer bien.” Des fois je me dis que cette citation a été écrite pour moi….

Il lui sourit, ça n’avait pas vraiment de rapport avec ce qu’elle avait dit plus tôt mais c’était la vérité. Il ressentait le besoin de lui dire, comme de la mettre en garde de lui et quoi de mieux que des paroles de Decartes pour exprimer son ressentis?